Jean Malaurie est, selon Michel Le Bris, dans le Dictionnaire amoureux des explorateurs, « le dernier géant de la lignée des Nansen et des Amundsen. ». Il est le premier homme au monde à s’être rendu, en deux traîneaux à chiens, avec l’esquimau Kutsikitsoq, le 29 mai 1951, sur le glacier au nord du Groenland, au pôle géomagnétique nord, dans des conditions dramatiques. Il dirige depuis soixante ans le célèbre Centre d’Études Arctiques (Paris, EHESS-CNRS), où se sont tenus en novembre 1963, l’Assemblée circumpolaire des peuples, et en mai 1973, le premier Congrès du pétrole arctique.-Dans cet entretien de trois heures, Jean Malaurie, en anthropologue naturaliste et comme le qualifiait Gille Deleuze, en « géo philosophe », s’attache à montrer que les Inuit, auprès desquels il s’est immergé durant 31 missions solitaires, sont des « méditants contemplatifs ». Ces chasseurs sont conscients que la matière – notamment les pierres - ne sont pas inertes mais sensibles ; ils pratiquent avec les « invisibles », l’animisme. Pensée sauvage minorée durant des siècles. Jean Malaurie est le premier occidental qui a découvert en Tchoukotka, le Stonehenge du chamanisme sibérien : L’allée des baleines, d’inspiration Yi-Jing. Il s’attache également au devenir de ces populations arctiques puisque la découverte du pétrole et les changements climatiques les font s’intégrer dans l’économie mondiale. Dans ce passionnant témoignage, Jean Malaurie apparaît tant à travers la mythique collection Terre Humaine, qu’à travers l’Académie polaire d’État à Saint-Petersbourg dont il est le Président à vie, comme le défenseur infatigable de toutes les minorités, dans une volonté de dialogue constructif entre les autorités et ces jeunes nations de volonté écologiste.